Les bambins acquièrent de la tolérance contre les expériences ennuyeuses. Pour certains, il ne s’agit que de se tenir loin de la « tentation ». À Walden Two on développe chez l’enfant l’habileté d’accepter de faire une chose désagréable immédiatment pour un mieux être plus tard et on l’arme pour faire face aux circonstances. Les pratiques religieuses faisant référence à un ciel ou à un enfer reposent au fond sur une fraude et ne saurait constituer une formule gagnante à long terme. « Ce que Jésus offrait en retour de l’amour de ses ennemis, c’était le ciel sur terre, la paix de l’esprit » dit Frazier.
L’enseignement de l’éthique se fait avant six ans. L’enfant apprend à garder loin de lui un objet qu’il envie mais qu’il est convenu dans la communauté de ne pas utiliser sans réserve. Si l’enfant n’est pas en mesure de découvrir de lui-même ce qui est bien ou mal, ses éducateurs n’hésitent pas à intervenir verbalement. Comme exemple, des enfants sont invités à examiner leur réaction émotive à la vue de bonbons. Ça leur fait sentir le besoin de savoir se maîtriser. Les bonbons sont cachés. On leur demande s’ils éprouvent moins d’envie ou plus de joie. On présente soudainement une distraction – par exemple, un jeu. Par la suite, on reparle des bonbons et on invite les enfants à revoir leur réaction. L’effet de la distraction est généralement évident. Quand on reprend l’expérience le lendemain, les enfants vont spontanément mettre leur bonbons sous clés. Subséquemment, on leur apprend à mettre sous clés mentalement.
La tolérance au désagréable s’apprend par exposition graduelle à la douleur ou au retrait de plaisir. La confrontation à la jalousie et l’envie s’enseigne autant que les mathématiques par l’expérimentation de situations et on entraîne à l’humour, là encore, graduellement. Le professeur pense que Frazier en met plus qu’il en a fait et ça l’ennui. Castle lui demande pourquoi toutes ces tortures. Il répond pour la satisfaction qu’ils obtiennent de rapports sociaux plaisants et profitables à un niveau inimaginable au monde. Ils en sont reconnaissants à la communauté mais ne se sentent pas supérieur pour autant. Ils n’apprennent pas à prendre plaisir à le faire. Le triomphe sur la nature ou sur soi est permis, sur les autres, jamais.
Ce qui distingue particulièrement l’enseignement de Walden Two de l’enseignement traditionnel, c’est précisément qu’il est de l’enseignement et non de la sélection. L’école publique du XIX siècle a produit quelques braves hommes en érigeant des barrières pratiquement infranchissables et en tirant le plus des rares qui les franchissaient. Les rejets sont énormes. À Walden Two, tous deviennent braves. L’adversité ne sert par à sélectionner mais à développer. L’enfant acquiert ainsi de la maîtrise.
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